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Pérégrinations en tous genres d’un économiste en cavale

« J’ignore si tu prendras grand intérêt aux pérégrinations d’un touriste parti de Paris en plein novembre » (Gérard de Nerval, Voyage en Orient, 1851).

Ce site laisse libre cours à mes pérégrinations, d’ordre intellectuel, politique ou voyageuse: j’espère en tirer des réflexions et des émotions propices à l’échange.

Le Blog propose des interventions courtes, plus ou moins liées à l’actualité, tandis que l’onglet Analyses présente des textes plus substantiels (sommaires ci-dessous). L’onglet Lieux et Moments partage des pérégrinations davantage terrestres, souvent, mais pas toujours, à cheval. Et j’y use de la photographie pour mémoriser l’expérience conjointe et singulière d’un lieu et d’un moment.

Sous l’onglet A propos, je retrace aussi mon parcours professionnel d’économiste et de statisticien ainsi que ses interactions avec les circonstances sociales et politiques des décennies 1970 à 2010. Je recense et je mets à disposition, sous l’onglet Publications, les travaux que j’ai conduits au long de ce parcours, dans différents domaines et au sein de diverses institutions.

Je signale sur la page d’accueil des actualités publiques aussi bien que personnelles: impressions et humeurs du moment, événements artistiques qui m’ont touché, articles récents que je juge pertinents et significatifs, livres lus et films vus qui m’ont donné l’envie de les partager.

J’indique ci-dessous le sommaire actuel du blog et de l’onglet Analyses.

Billets de blog

Introspection post-Brexit, 31 mars 2024
Filmer les migrations, 11 février 2024
Trois femmes en libre cavale, 2 février 2024
Bellochio, Scorsese: leçons d’histoire au cinéma, 7 novembre 2023
Lohengrin par Serebrennikov: la mort du romantisme, 19 octobre 2023
Chili, une si longue convalescence, 9 septembre 2023
Lamento haïtien, Guy Regis Jr, « L’homme qui n’arrête pas d’arrêter », 4 août 2023
L’anti-nostalgie, A propos du film de Nanni Moretti, « Vers un avenir radieux », 6 juillet 2023
Ecrire la guerre, 11 juin 2023
Übergang, 31 mai 2023
L’irréfragable devoir de mémoire, 27 avril 2023
Un roman yiddish d’aujourd’hui, 12 avril 2023
Que faire de la Russie ? Deux points de vue ukrainiens, 21 mars 2023
Les Trente Glorieuses en feuilleton (note de lecture), 13 mars 2023
La sécurité sociale, invention inachevée (note de lecture), 7 février 2023
« Celui qui veille », Louise Erdrich (note de lecture), 14 août 2022
Lectures printanières, 10 mai 2022
L’Ukraine, nation d’Europe, 24 mars 2022
Syndicalisme: mise au point et contrepoint, 7 juin 2021
La fabrique des prophètes, 13 mai 2021
Philosophie pour temps incertains: « La quête de certitude », John Dewey, 15 novembre 2020
Le ressentiment social, passion triste et littéraire: Monte-Cristo et Sorel, 11 octobre 2020
La double angoisse des boomers, 28 août 2020
Péripéties et palinodies électorales à Pordic, 8 juin 2020
Etre bi- (parigot / néo-breton), 24 mai 2020
Pordic, moyenne Bretagne, 11 mai 2020
Les confinés de Conlie, 22 mars 2020
Adieu au productivisme ?, 28 janvier 2020
L’homme révolté, ou la tragédie de l’émancipation (petit hommage post-soixante-huitard à Albert Camus), 15 janvier 2020
Le désarroi européen, affaire romanesque, 19 novembre 2019
De Gellner à Hobsbawm, ou la dissolution ratée du nationalisme dans le libéralisme, 28 octobre 2019
Une amitié intellectuelle et politique: croisements avec Robert Salais, 23 septembre 2019
Passion d’Europe: entretien avec Philippe Herzog, 5 avril 2019
Rififi(s) à Bruxelles, 3 avril 2019
L’économie du bricolage comportemental, 7 février 2019
Apte à la retraite ?, 20 novembre 2018
Social Polar dans les Vosges, 7 novembre 2018
Député-e-s et chercheur-e-s face à l’évaluation des politiques publiques, 29 juin 2018
Social Thriller(s) : à propos du film de Stéphane Brizé, « En guerre », 4 juin 2018
Relire « Nations et nationalisme », d’Ernest Gellner, 2 juin 2018
La gouvernance par les nombres, pour une articulation de la raison juridique et de la raison statistique (introduction), 3 mai à 2018
Les enfants rebelles du paritarisme, 6 mars 2018
La mémoire des crises est-elle utile ?, 18 février 2018
Le syndicaliste, l’élu et l’expert, 17 février 2018
Défrichage, Déchiffrage, 16 février 2018

Analyses

Organiser et financer l’industrie de défense, 20 avril 2024
Vers la naturalisation de l’homo œconomicus ?, 9 juillet 2018
Le quinquennat sous l’ombre du cycle (ou petite épistémologie du cycle à usage public), 18 février 2018

Voilà un roman sacrément culotté, une reprise décalée et ironique, une version féministe et semi-fantastique du monument littéraire et centenaire qu'est « La montagne magique » de Thomas Mann, chronique de la perdition maladive et amoureuse au temps de la phtisie endémique. Olga Tokarczuk a la stature pour se mesurer au monument. D'autant qu'elle bénéficie du sceau de l'authenticité : la scène, aussi à la veille fébrile de la première guerre mondiale, n'est plus Davos mais Görbersdorf / Sokolowsko, village de Basse-Silésie, dans la chaine montagneuse des Sudètes, aujourd’hui en Pologne, là où le Dr Hermann Brehmer fonda en effet dans les années 1850 le premier sanatorium dédié aux patients tuberculeux. Miecsyslaw, jeune homme polonais venu de Lvov, doux et secret, qui a de bonnes raisons pour l’être, mais pas si ingénu qu’il en a l’air, vient en cure dans le sanatorium et loge dans une médiocre pension pour messieurs. Il se trouve plongé dans une ambiance toxique de masculinité frustrée et jacassante, saturée par les conversations souvent oiseuses, faussement savantes, excitées par les effets délétères d’une liqueur locale curieusement nommée Schwärmerei (comme la périlleuse "raison négative" de Kant !), que mènent les personnages disparates réunis là par le sort commun qui altère leurs poumons. Olga Tokarczuk disperse habilement dans leurs propos les paraphrases de propos misogynes réellement tenus par une vaste collection d’auteurs de référence au cours des siècles écoulés jusqu’à aujourd’hui (indiquée en vrac et en annexe, cette liste incite chaque lecteur à se livrer au jeu de piste de la juste réattribution de ces propos !). Mais, dans ce village empreint de superstitions montagnardes, rôdent les âmes errantes des sorcières et des femmes martyrisées au cours des siècles, empouses protéiformes et furtives qui viennent régulièrement réclamer leur dû de meurtres rituels. Décidément, cette montagne est plus magique, ou maléfique, que la première. Sa vulnérabilité en sauvera Miecsyslaw.

Le Musée national de la Marine de Paris a réouvert a l'automne 2023, après sept ans de fermeture, avec une muséographie profondément remaniée et modernisée, vivante et dynamique. Mais il conserve précieusement de belles pièces historiques, comme ces portraits des ports français, commandités par la Royauté puis par la Révolution. Ainsi, ces deux visions de Brest à la fin du 18e siècle, depuis l'intérieur de l'estuaire de la Penfeld et depuis Recouvrance. On reconnait le port et la ville sans pouvoir jamais les voir ainsi.

Anne de Bretagne accueille Gengis Khan en son château. Dans la foulée du passionnant ouvrage de l'historienne Marie Favereau, "La Horde. Comment les Mongols ont changé le monde", le château des ducs, à Nantes, présente une exposition qui, au-delà de la figure emblématique de Gengis Khan, avant et après lui, décrit et explique le fonctionnement, l'expansion et la haute culture de ces empires nomades, allant un temps de l'extrême asiatique à l'Europe centrale, qui administrèrent des villes et des populations sédentaires. Et, au coeur de leur logistique, il y eut le cheval.

Claudine, habile couturière qui ravit ses clientes, mène une vie de sacerdoce en fond de vallée auprès de son grand fils handicapé, dont elle s'occupe avec un amour tendre et attentionné. Une fin d’après-midi par semaine, elle s’évade en haut de la montagne pour des rencontres furtives mais franches avec des hommes de passage dans un hôtel lové près d’un barrage d’altitude. Elle les fait parler de leur vie, là où ils habitent, et tire de ces récits des lettres inventées du père disparu de son fils, qu’elle lit à ce dernier. Un jour, elle tombe sur un homme pas comme les autres, intrigué par le mystère de cette femme. C’est un ingénieur hydraulique allant de mission en mission, qui lui fait découvrir les impressionnants arcanes du barrage. La montagne, d’une rudesse fascinante, devient le décor magique d’une rencontre passionnée. Mais le retour à la vallée est aussi le retour à la réalité quotidienne. Et Claudine éprouve une soif angoissée de liberté dans le labyrinthe de sa vie. Jeanne Balibar prête à cette femme le charme énigmatique qui est le sien. Le film porte un regard à la fois humaniste et réaliste sur le handicap – l’acteur Pierre-Antoine Dubey habite, avec une étonnante crédibilité, le corps et l’esprit du fils handicapé. Le réalisateur Maxime Rappaz offre, avec son premier long-métrage "Laissez-moi", un conte troublant autant qu'émouvant.

Parce que le livre fut support majeur du mouvement humaniste qui anima la Renaissance européenne, cette exposition savante autant que plaisante a sa place toute trouvée dans la galerie Mansard de la Bibliothèque nationale de France, sur son site historique Richelieu. Mais elle ne se borne pas au livre et, si elle est bien dotée en superbes manuscrits et livres imprimés sortis des réserves, ces derniers cohabitent avec estampes, dessins, sculptures,... qui témoignent du mouvement culturel d'ensemble qui emporta la Renaissance.

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